Pendant plus de 60 ans, les phares jaunes ont été une caractéristique emblématique des voitures françaises. Cette particularité, loin d’être simplement esthétique, relevait d’une approche novatrice de la sécurité routière, notamment dans des conditions météorologiques difficiles. Retour sur cette spécificité française qui a marqué l’histoire de l’automobile.
L’origine des phares jaunes en France
L’histoire des phares jaunes en France débute officiellement en 1936, avec l’adoption d’une loi rendant obligatoire cette couleur pour tous les véhicules immatriculés sur le territoire français. Cette réglementation, unique en Europe, est restée en vigueur jusqu’en 1999, date à laquelle l’harmonisation des normes européennes a mis fin à cette particularité hexagonale.
Contrairement à une légende urbaine tenace, l’adoption des phares jaunes n’avait rien à voir avec une volonté de différencier les véhicules français des véhicules allemands durant la montée des tensions précédant la Seconde Guerre mondiale. En réalité, cette décision était fondée sur des considérations purement techniques et sécuritaires.
Les avantages techniques des phares jaunes
L’utilisation de phares jaunes, officiellement appelés « jaune sélectif », reposait sur plusieurs avantages techniques :
Meilleure visibilité par mauvais temps : La lumière jaune, ayant une longueur d’onde plus longue que la lumière blanche, pénètre mieux le brouillard, la pluie et la neige. Elle subit moins de diffraction et de dispersion dans ces conditions, offrant ainsi une meilleure visibilité au conducteur.
Réduction de l’éblouissement : Les phares jaunes provoquaient moins d’éblouissement pour les conducteurs venant en sens inverse ou observés dans le rétroviseur. Cet aspect était particulièrement apprécié sur les routes non éclairées.
Meilleur contraste : Dans des conditions de faible visibilité, la lumière jaune créait un contraste plus marqué avec l’environnement, rendant les lignes de la route et les panneaux de signalisation plus visibles.
Réduction de l’auto-éblouissement : Le phénomène de réflexion de la lumière sur les panneaux de signalisation, potentiellement gênant pour le conducteur, était minimisé avec les phares jaunes.
La technologie derrière les phares jaunes
Il est important de noter que les ampoules utilisées dans les phares jaunes émettaient en réalité une lumière blanche. Le fameux « jaune sélectif » était obtenu grâce à un filtre placé devant l’ampoule. Ce filtre absorbait une partie du spectre lumineux, ne laissant passer que les longueurs d’onde correspondant au jaune.
Cette filtration avait cependant un inconvénient : elle réduisait l’intensité lumineuse totale émise par le phare. En termes techniques, le nombre de lumens (unité de mesure du flux lumineux) était diminué. Paradoxalement, c’est cette réduction qui contribuait à certains des avantages mentionnés précédemment, notamment la réduction de l’éblouissement.
Les innovations complémentaires
Certains constructeurs français, comme Citroën avec ses modèles DS et SM, ont poussé l’innovation encore plus loin. Ces véhicules étaient équipés de phares dotés de lignes gravées sur le verre de protection. Ces lignes avaient pour fonction de diffracter la lumière verticalement, créant ainsi des faisceaux lumineux orientés vers le haut. Cette astuce technique permettait d’éclairer plus efficacement les panneaux de signalisation en hauteur, comme ceux présents sur les portiques routiers.
La fin d’une ère
En 1999, l’Union Européenne a adopté une réglementation commune pour tous les États membres concernant l’éclairage des véhicules. Cette harmonisation a sonné le glas des phares jaunes en France. Depuis lors, tous les véhicules neufs commercialisés en France sont équipés de phares blancs, comme dans le reste de l’Europe.
Cette transition n’a pas été sans susciter quelques nostalgies chez certains automobilistes et passionnés, pour qui les phares jaunes représentaient un élément distinctif de l’industrie automobile française.
L’héritage des phares jaunes
Bien que les phares jaunes aient disparu des routes françaises, leur héritage perdure dans certaines applications spécifiques. Les feux antibrouillard jaunes, par exemple, restent populaires dans de nombreux pays, y compris en dehors de la France, en raison de leur efficacité dans des conditions de visibilité réduite.
De plus, les recherches menées sur l’efficacité des différentes couleurs de lumière dans diverses conditions météorologiques continuent d’influencer le développement des systèmes d’éclairage modernes. Les phares adaptatifs, capables de modifier leur couleur et leur intensité en fonction des conditions de conduite, sont un exemple direct de l’évolution de cette technologie.
Un regard vers l’avenir
L’histoire des phares jaunes en France nous rappelle que l’innovation dans le domaine de la sécurité routière peut prendre des formes inattendues. Alors que nous entrons dans l’ère des véhicules autonomes et des systèmes d’éclairage intelligents, les leçons tirées de cette période unique de l’histoire automobile française continuent d’informer les ingénieurs et les concepteurs.
Les phares jaunes, bien qu’ils appartiennent désormais au passé, restent un témoignage fascinant de l’ingéniosité française en matière de sécurité routière. Ils nous rappellent que parfois, les solutions les plus simples peuvent avoir un impact significatif sur notre sécurité au volant.
Pour clore ce chapitre de l’histoire automobile, il est intéressant de noter que malgré la disparition des phares jaunes, leur esprit d’innovation continue d’inspirer les avancées technologiques dans le domaine de l’éclairage automobile, contribuant ainsi à rendre nos routes toujours plus sûres, quelles que soient les conditions de conduite.
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